QUESTION DU MOIS – SEPTEMBRE 2023

J’ai reçu un courrier qui m’informe qu’une saisie doit être pratiquée sur la rémunération de mon collaborateur. Que dois-je faire concrètement ?

Si l’un de vos travailleurs est endetté auprès d’un tiers, il se peut que ce dernier s’adresse à vous en votre qualité d’employeur débiteur de sa rémunération, afin d’obtenir paiement de sa créance directement auprès de vous. Le cas échéant, il vous appartient de réagir adéquatement et dans les délais légaux car autrement, vous pourriez être déclaré débiteur pur et simple de la dette de votre collaborateur.

Si une saisie vous est signifiée en tant qu’employeur, il y a lieu d’être bien attentif afin d’éviter de mauvaises surprises. Vous trouverez par conséquent ci-dessous un rappel des principes applicables (sauf en cas de saisies alimentaires que nous ne traitons pas dans la présente question du mois) et des formalités à accomplir lorsqu’on vous signifie une saisie en tant qu’employeur.

La présente question du mois traite uniquement de la problématique des saisies mais sachez qu’il existe d’autres mécanismes de retenues sur salaire, dont la cession. En tout état de cause, sachez qu’en cas de saisie ou de cession, il est primordial de prévenir votre gestionnaire de dossier dans les meilleurs délais. Ainsi, le service juridique pourra vous aider à remplir vos obligations en la matière et faire en sorte que les retenues soient effectuées.

  1. Formes et effets de la signification d’une saisie 

Pour produire ses effets à votre égard, la saisie doit vous être signifiée :

  • par exploit d’huissier ;
  • par courrier recommandé (valable uniquement si le créancier est l’administration fiscale) ;
  • ou par pli judiciaire contenant copie d’une ordonnance du juge des saisies (lorsque la saisie a fait l’objet d’un litige tranché judiciairement).

Dès l’instant où une saisie vous est valablement signifiée en tant qu’employeur, vous ne pouvez, en principe, plus verser à votre collaborateur l’entièreté de sa rémunération. La quotité saisissable de la rémunération de votre collaborateur devra être versée au créancier.

En effet, dans ce cas, il est important de  distinguer la partie saisissable de sa rémunération de celle insaisissable, et ne plus lui verser que celle insaisissable. La rémunération d’un travailleur n’est en effet pas intégralement saisissable. Le Code judiciaire plafonne les sommes pouvant faire l’objet d’une saisie, et ce, par tranches de rémunération nette (indexées régulièrement). Pour le calcul de cette quotité saisissable, il est également, en principe, tenu compte du nombre d’enfants à charge de votre travailleur.

  1. Avertissement de votre gestionnaire de dossier

Lorsqu’une saisie vous est signifiée, il est dès lors important que vous en informiez le plus rapidement possible votre gestionnaire de dossier, et que vous lui transmettiez une copie du document que vous avez reçu (exploit d’huissier, courrier recommandé ou ordonnance du juge des saisies).

Votre gestionnaire de dossier procèdera alors pour vous au calcul de la quotité saisissable de la rémunération de votre travailleur. Il vous reviendra ensuite avec les informations nécessaires à la déclaration de tiers saisie.

  1. Déclaration de tiers saisi

Endéans les 15 jours de la signification d’une saisie, vous devez réaliser une déclaration de tiers saisi.

Une déclaration de tiers saisi a pour objet de communiquer au créancier (ou à l’huissier de justice instrumentant), ainsi qu’au travailleur, les éléments susceptibles d’être saisis et/ou les raisons qui font qu’aucune retenue ne pourra être opérée.

Elle prend la forme soit d’un formulaire que nous pouvons vous aider à compléter, soit d’un courrier dont nous pouvons vous fournir un modèle, et que vous devez en revanche adresser vous-même au créancier (ou à l’huissier de justice instrumentant), ainsi qu’à votre travailleur.

  1. Dénonciation et possibilité d’opposition

De son côté, votre collaborateur aura également été informé de la saisie que son créancier souhaite pratiquer sur son salaire via ce que l’on appelle une dénonciation.

Dans un délai de 15 jours à compter du lendemain de cette dénonciation, votre collaborateur aura la possibilité de faire opposition à cette saisie en citant son créancier devant le juge des saisies. Le cas échéant, vous devriez être informé par exploit d’huissier.  

Si votre collaborateur forme opposition à la saisie qui vous a été signifiée, vous ne serez toutefois pas libéré de votre obligation d’effectuer des retenues sur sa rémunération. Par ailleurs, avant de connaître l’issue de la procédure entamée par votre collaborateur, vous ne pourrez pas non plus verser les sommes retenues au créancier de votre collaborateur. En définitive, vous ne pourrez verser la quotité saisissable de la rémunération de votre collaborateur ni à ce dernier, ni à son créancier. Dans pareille hypothèse, il faut  dès lors conserver les montants retenus.

Si dans un délai de 17 jours suivant la dénonciation de la saisie au travailleur ce dernier n’a pas formé opposition, vous devez verser les sommes retenues au créancier de votre travailleur. Afin de vous assurer que 17 jours se sont bien écoulés depuis la dénonciation de la saisie au travailleur, vous devez dès lors être informé de cette dénonciation et de la date à laquelle elle a eu lieu. C’est ce que l’on appelle la contre-dénonciation. Cela se fait généralement par la remise du créancier (ou de l’huissier de justice instrumentant) à l’employeur d’une copie de ladite dénonciation.

  1. Mainlevée

Pour finir, vous ne pourrez cesser les retenues et/ou versements en faveur du créancier de votre collaborateur que lorsqu’une mainlevée vous aura été communiquée. Il s’agit d’une confirmation écrite du créancier (ou de l’huissier de justice instrumentant) que la saisie n’a plus de raison d’être. Une mainlevée vous sera ainsi par exemple notifiée si votre travailleur paie à son créancier l’entièreté de sa dette lui-même, ou lorsque les versements réalisés auront remboursé l’entièreté de la dette.  

En pratique, nous vous invitons à communiquer toute mainlevée que vous recevriez, le plus rapidement possible, à votre gestionnaire de dossier. Ce dernier en tiendra alors compte pour le calcul du prochain salaire de votre collaborateur. Si vous ne tenez pas votre gestionnaire de dossier informé, ce dernier continuera de calculer le salaire à verser à votre collaborateur sous déduction de la quotité saisissable. Vous risqueriez dès lors d’être en défaut de verser à votre collaborateur les sommes qui lui sont dues à titre de rémunération. Ce qui constitue une infraction pénale. 

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Comme vous pouvez le constater, la matière de saisies est particulièrement formaliste. Afin d’éviter de mauvaises surprises, nous vous invitons à prévenir votre gestionnaire de dossier dès que vous avez connaissance d’une saisie sur la rémunération d’un de vos collaborateurs.

En cas de questions, n’hésitez en outre jamais à prendre contact avec notre service juridique à l’adresse mail legal@ssn.be.

By Carlotta Di Marco
Legal Officer